Votre objectif, en tant que Compliance Officer, est de protéger, de sécuriser et de défendre les intérêts de votre organisation. Pour ce faire, vous avez probablement d’ores et déjà fait votre cartographie des risques, établi un plan d’action. Mais comment le déployer ?
L’engagement de la direction, le « tone at the top » est nécessaire. L’exemplarité des managers est indispensable. Mais qu’en est-il du reste de l’organisation ? L’écueil classique est l’engagement souvent trop tardif de l’ensemble des employés.
Impliquer tous vos collaborateurs dès le départ permettrait d’instaurer une confiance mutuelle et favoriserait une adhésion globale à votre programme de lutte contre la corruption.
Qu’est-ce que l’engagement employé ?
Si on en croit Wikipédia, un collaborateur engagé est « une personne pleinement absorbée et enthousiasmée par son travail, qui va promouvoir la réputation et les intérêts de l’organisation. Un collaborateur engagé adopte une attitude positive envers l’organisation et ses valeurs. »
L’engagement employé est une action à double sens. C’est une implication mutuelle entre l’organisation et ses employés.
L’alignement avec les valeurs de l’organisation semble être le premier indicateur de l’engagement employé : les collaborateurs engagés adhèrent aux valeurs de leur organisation ainsi qu’à celles de leur propre équipe, et ils sont déterminés à assurer le succès des deux.
Obtenir l’engagement global est une mission complexe et ce pour plusieurs raisons (pas toujours cumulatives) :
- Un sentiment d’appartenance limité. Les collaborateurs ont tendance à se concentrer sur leur équipe, ils paraissent engagés avec leurs collègues, mais ne le sont peu ou pas avec l’organisation dans son ensemble. Et ce d’autant plus dans les grands groupes : leur sentiment d’appartenance est limité à leur équipe ; leur fidélité et leur implication ne concerne que ceux avec lesquels ils interagissent chaque jour.
- Un manque de clarté dans les objectifs. Les collaborateurs ne se sentent pas connectés : ils ne comprennent pas les objectifs et la stratégie de l’organisation. Ils ne comprennent pas leur implication globale, ne voient pas leur contribution.
- Un manque d’écoute. Il arrive fréquemment que les collaborateurs ne se sentent pas écouté. Cela peut concerner des suggestions proprement opérationnelles, ou bien des sujets plus larges tels des initiatives RSE.
Un vrai défi à relever pour les Compliance Officers
L’un des plus grands défis auxquels les Compliance Officers sont confrontées aujourd’hui est la capacité à embarquer l’ensemble des employés. La conformité est un sujet complexe, la lutte contre la corruption semble lointaine et peu se sentent directement concernés par les risques.
Pour contrer les émotions négatives associées à la mise en place de nouvelles politiques et procédures, à la nécessité d’évaluer les tiers, il est important de rencontrer et de parler avec le plus grand nombre possible de personnes au sein d’une organisation. Le partage d’expérience, la compréhension des défis et craintes spécifiques à chaque fonction, vous permettra de mettre le doigt sur les points « durs » et cocréer des solutions.
Vous l’aurez compris : il est essentiel que tous les employés sachent que leur contribution est écoutée, importante et valorisée. Il est essentiel d’établir une relation fondée sur la confiance.
Quelques pistes à explorer
Le succès de la mise en place de votre programme de lutte contre la corruption dépendra de multiples facteurs.
User du « Tone at the top » et impliquer les managers
Le « tone at the top » joue un rôle fondamental pour susciter un engagement significatif. L’équipe dirigeante et l’ensemble des managers se doit non seulement d’adhérer au programme de lutte contre la corruption, mais en être sponsor.
Un management exemplaire et motivant. Le rôle des managers est d’expliquer les valeurs de l’organisation, d’accompagner ses équipes et surtout de promouvoir l’adhésion de celles-ci au programme de lutte contre la corruption. Pour ce faire, l’équipe dirigeante et l’ensemble des managers doit à minima :
- Promouvoir une culture d’intégrité, de rigueur et de responsabilité
- Promouvoir le respect du code de conduite et normes légales et réglementaires en vigueur
- Assumer l’entière responsabilité de leurs actions et décisions
- Être transparent dans le processus de prise de décision
- Agir avec la plus grande rigueur, même en l’absence de contrôles ou lorsque ceux-ci s’avèrent insuffisants ou inadaptés aux besoins
- Favoriser un climat d’amélioration continue qui permette de détecter les risques
- Stimuler l’adhésion de ses équipes au programme de lutte contre la corruption, en créant une culture de confiance et de respect mutuel
- Comprendre les risques de malversations et savoir identifier les signes d’alerte et donner les clés aux employés pour qu’ils puissent eux aussi les identifier
Instaurer une culture de conformité
Pour s’assurer de l’engagement des employés au programme de lutte contre la corruption, il est nécessaire de créer un lien fort entre l’organisation et ses collaborateurs. Qu’il s’agisse d’un nouveau collaborateur ou d’un employé se voyant attribuer de nouvelles fonctions : ils doivent comprendre que l’engagement en faveur d’une conduite éthique est un must dans l’organisation.
Ayez un discours fort sur l’organisation et l’importance du programme de lutte contre la corruption dans celle-ci. Racontez une histoire : l’histoire de l’organisation (son origine, son passé, son présent), ce qui anime ses dirigeants, le choix des valeurs, votre rôle ainsi que le rôle de chaque employé. Votre discours doit être sincère, convaincant, stimulant et soutenu par tous dans l’entreprise, y compris l’équipe dirigeante.
Mettre en place des procédures
La compréhension des interrelations entre les personnes et les processus peut avoir un impact vital, positif ou négatif, sur le succès de votre programme de lutte contre la corruption.
Vous avez fait une cartographie des risques, vous avez établi un plan d’action ? Comment l’articuler avec la réalité du terrain ?
Des procédures qui fonctionnent sont la base d’un programme solide. Notez que nous ne parlons pas de politiques, mais bel et bien de procédures. Pourquoi ? Car des politiques seules, sans procédures pour les faire appliquer, ne suffisent pas. Les procédures sont clés.
Toute la difficulté est dans la mise en œuvre. Pour qu’il y ait adhésion, vous devez vous assurer de la bonne articulation avec vos nouvelles procédures et les existantes. Il s’agit de trouver un moyen d’atténuer les risques de corruption sans devenir un irritant. Parfois, il suffira de mettre à jour des procédures existantes et d’y ajouter des étapes (évaluation des tiers dans la procédure de qualification d’un fournisseur par exemple).
Les procédures existantes doivent pouvoir être améliorés et pouvoir coexister avec votre plan d’action.
Intégrer l’éthique et la conformité dans les plans de formations
Aussi importantes que puissent être les politiques et les procédures, elles ne suffisent pas à elles seules. La formation des employés est cruciale. Une sensibilisation massive des équipes permettra de faire face à au pire des risques : celui que vous n’aviez pas anticipé. La sensibilisation des employés les aidera à mieux appréhender les problèmes d’éthique, à développer leur capacité d’analyse et d’être à même d’identifier un risque qui pourtant n’était pas cité en exemple dans vos politiques.
Faire de la communication votre allié
Pour mieux sécuriser les activités de votre organisation, communiquer n’est pas une option, c’est une nécessité. Le programme de lutte contre la corruption doit être connu et la fonction de Compliance Officer reconnue.
Partagez, engagez et communiquez en permanence avec les employés. Plus ils entendront parler de votre programme de lutte contre la corruption, mieux ils l’appréhenderont et seront en mesure de vous aider à identifier et atténuer les risques.
Être à l’écoute
Ecouter et faire entendre la voix des collaborateurs. Pour garantir l’engagement de tous, la voix des collaborateurs doit être entendue à travers toute l’organisation, tant pour les opinions qui soutiennent votre plan d’action, que celles qui le défient. Les employés doivent être impliqués, écoutés et invités à partager leur expérience, leur expertise et leurs idées.
En gardant votre porte ouverte à tous, en tendant l’oreille, vous deviendrez le centre du flux d’information. Les remontées du terrain, le partage d’expérience, les idées des uns des autres vous permettrons d’identifier de nouveaux risques, de proposer des procédures plus adaptées à la réalité opérationnelle, et des formations tenant compte de cas concrets du quotidien.
En résumé
Voici quelques suggestions concrètes issues du terrain pour générer l’engagement :
- Proposez un discours clair sur votre programme de lutte contre la corruption, pour partager une orientation commune. Invitez les collaborateurs à se joindre à votre programme, faites-leur comprendre que vous embarquez tous pour une aventure commune.
- Participez activement à l’onboarding des nouveaux collaborateurs, de sorte à partager les valeurs et leur application concrète via le programme de lutte contre la corruption.
- Valorisez les comportements alignés avec les valeurs de l’entreprise, les collaborateurs exemplaires, et développez une culture positive. Les récompenses peuvent être diverses et variées :
- Un article dans le journal interne
- Un arbre au nom du collaborateur peut être planté.
- Mettez en place une toolbox facilement accessible (sur l’intranet par exemple) à destination de tous les collaborateurs :
- Code de conduite et autres politiques faciles à lire et à comprendre
- Des infographies / supports visuels pour chaque sujet de conformité
- Des e-learnings et autres formats de sensibilisation
Bref, fournissez tout ce qui peut être utile pour une meilleur compréhension et adhésion à votre programme de lutte contre la corruption.
- Proposez des sensibilisations sous diverses formes, de façon à toucher le plus grand nombre : des e-learnings, formations en présentiel, des podcasts, vidéos, bandes dessinées, infographies, etc… Soutenez les initiatives de formation des collaborateurs et donnez-leurs les ressources dont ils ont besoin.
Mesurez la compréhension et l’engagement des collaborateurs de manière régulière, via des enquêtes par exemple. Le taux de participation ainsi que les résultats vous permettront d’évaluer et d’adapter le cas échéant votre programme de lutte contre la corruption.